De l’Hôtel de Ville à Montbenon, texte composé en atelier d’écriture
De l’Hôtel de Ville à Montbenon
Juin. On est en juin 2021. Le jour ? il me semble que c’était le 20. Il fait beau et chaud. Je descends la rue de la Mercerie – la propriétaire du petit magasin d’habits chics me voit passer. Elle dit qu’elle aime bien ma robe. Une robe à fleurs – comme dans la chanson d’Henri Salvador qu’il a enregistrée pour fêter ses 85 ans. A l’époque, j’en avais 25. Je portais souvent des robes à fleurs, parce que cette chanson, c’est la chanson de ma jeunesse à Paris, dans un été parfumé de rêves, d’amour …
En regardant en arrière, et voyant mon histoire, ce serait très possible de rencontrer un amour et y rester pour la vie. Fonder une famille, trouver un travail, peut-être divorcer.
Dans mon imaginaire d’il y a 20 ans, ma francophonie se résumait à Paris, aux soirées étoilées entre amis, à Henri Salvador et sa chambre avec vue.
Je descends la rue de la Mercerie 20 ans après, en robe blanche. On pourrait imaginer que partir ainsi endimanchée, ça me porterait à l’Hôtel de Ville. Il suffirait d’acheter un beau bouquet au marché – des pivoines, elles sont belles à cette époque-là – mais il s’agit d’un mardi après-midi. Pas de marché ni de fleurs au stand de la dame sympathique qui taquine son mari de trop planter, de la submerger avec toutes ses fleurs, si belles, si innocentes, si utopiques, comme l’été à Paris, en 2000.
Je descends la Mercerie, il fait beau et agréable. Les enfants vont chez une copine. Vers 16h, je dois retrouver ma copine pour un verre. Une fois tout terminé. Il faut fêter les grandes occasions de la vie.
Il y a neuf ans, quand je suis arrivée à Lausanne, un bébé de quatre mois dans les bras, c’était là-bas le premier endroit que j’ai connu. On avait un cocktail pour nous, on a été bien accueillis. J’avais toute une vie devant moi et tous les rêves du monde. Un nouveau pays, une nouvelle famille. Tout un monde à découvrir. C’était un autre type de fête à Montbenon.
Maintenant, huit ans après, un enfant de plus, j’ai d’autres rêves devant moi. Le premier vient d’être accompli. Je suis une femme entière, j’appartiens à moi-même, ma robe à fleurs est une robe blanche, festive, au tribunal. Je viens de signer mon divorce. Je suis redevenue moi-même. Ironiquement, au même endroit où huit ans avant j’ai découvert mon nouveau monde. Je commence ma nouvelle vie dès maintenant. Devant le tribunal, ma meilleure copine m’attend, on trinque à la vie, à l’amour, à la liberté, à l’avenir, à moi-même et à tout ce que moi et la vie pouvons devenir ensemble.